CIRCULAIRE du préfet du département de la Meurthe , à MM. les sous-préfets , maires et aux comités cantonnaux, contenant des dispositions réglementaires pour les écoles primaires des filles.
Nancy, le 2 juillet 1819.
Messieurs, trois années se sont à peine écoulées,
depuis qu'un acte du gouvernement a placé l'instruction primaire au rang
qu'elle doit occuper parmi les institutions sociales, et déjà les bons effets
des nouvelles dispositions se font sentir de toute part.
Exiger des garanties de la moralité et de la capacité
des individus auxquels on confie l'éducation des enfans, soumettre les écoles
à une surveillance éclairée et de tous les momens, tels sont les principes
qui ont servi de bases à l'ordonnance royale du 29 février 1816.
Mais plus les résultats obtenus par l'application
des dispositions de cette ordonnance aux écoles de garçons ont été
heureux, et plus on regrettait que celles de ces dispositions qui en sont
susceptibles , ne fussent point étendues aux écoles de filles , qui , quoique
moins nombreuses , mais non moins intéressantes , appellent aussi la
sollicitude de l'autorité.
S. Exc. le ministre de l'intérieur, qui a reconnu
l'utilité de cette mesure, vient de tracer à l'administration la marche à
tenir pour appliquer aux écoles des filles les dispositions générales de
l'ordonnance royale du 29 février 1816, et pour suppléer , en quelques points
, au silence de cette ordonnance.
Les trois objets dont l'administration doit s'occuper
sont: 1° le choix des institutrices; 2° la surveillance des écoles; 3.°
l'augmentation de leur nombre.
La surveillance de ces institutrices devant être
attribuée aux comités cantonnaux, et l'ordonnance du 29 février, indiquant
suffisamment de quelle manière cette surveillance doit être exercée, je crois
inutile de m'étendre sur ce point.
L'article 32 de l'ordonnance précitée prescrivant
la séparation des sexes, MM. les maires sont invités et requis, au besoin de
proposer à l'administration les mesures convenables pour assurer l'exécution
de cette disposition. Les comités cantonnaux proposeront à l'administration
les mesures qui leur paraîtront praticables , suivant les localités, lorsque
le défaut de ressources et le défaut de locaux convenables ne permettront pas
l'établissement d'écoles particulières pour les filles , pour opérer la séparation
des sexes. Ils se conformeront, à cet égard, aux dispositions contenues dans
l'instruction de M. le recteur de l'académie de Nancy, du 10 décembre 1817.
L'opération la plus importante est celle qui est
relative au choix des institutrices. Une commission composée de cinq membres,
nommée par le préfet, sera établie au chef-lieu du département. Cette
commission sera chargée d'examiner, sous le rapport de l'instruction, les
personnes qui désireront se vouer aux fonctions d'institutrices.
Aucune postulante, fille, mariée ou veuve, ne sera
admise devant le jury d'examen , si elle n'est âgée de vingt ans au moins , et
si elle n'est munie des pièces suivantes, dont vérification sera faite:
1° Un acte de naissance, et, si elle est mariée, un
extrait de l'acte de célébration de son mariage.
2° Un certificat de bonne conduite et de bonnes
moeurs les curés et maires de la commune ou des communes où elle aura habité
depuis trois ans au moins.
D'après le rapport du jury d'examen, il sera délivré,
s'il y a lieu, à la postulante un brevet de capacité.
Ces brevets seront de deux degrés : ceux de deuxième
degré ou du degré inférieur seront accordés aux personnes qui sauront
suffisamment lire, écrire et chiffrer pour en donner des leçons.
Les connaissances exigées des institutrices du
premier degré seront les principes de leur religion, la lecture , l'écriture,
les quatre premières règles de l'arithmétique et celles de trois et de société,
et les élémens de la grammaire.
Pour avoir le droit d'exercer, il faudra, outre le
brevet de capacité , une autorisation spéciale pour une commune déterminée ;
autorisation qui ne sera délivrée que sur la proposition qui sera faite par le
maire et le curé ou desservant , ou par le fondateur de l'école, avec l'avis
du comité cantonnal.
Lorsqu'une institutrice, munie d'un brevet de capacité
obtenu dans un autre département , se présentera pour exercer sa profession
dans celui de la Meurthe , elle sera dispensée de subir l'examen ; mais elle
n'en sera pas moins tenue de produire les certificats de bonnes vie et moeurs
exigés des personnes qui entrent dans la carrière de l'enseignement.
L'exibition de ces Certificats n'empêchera pas
l'administration, lorsqu'ils ne paraîtront pas lui offrir toutes les garanties
désirables, de se procurer directement des renseignemens plus complets.
Lorsqu'une institutrice demandera l'autorisation de
passer d'une commune du département dans une autre, elle sera tenue de présenter
des certificats de bonne conduite du maire et du curé ou desservant de la
commune qu'elle va quitter. En cas de refus du maire, ce magistrat rendra compte
de ses motifs au préfet, qui prendra l'avis du comité cantonnal,
Les articles 7, 8, 9, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21
, 22 , 23 , 25 , 26 , 27 , 28 , 31 , 39 et 40 de l'ordonnance du 29 février
1816, sont applicables aux écoles primaires des filles en substituant,
toutefois, à l'intervention de M. le recteur, celle du préfet.
Les institutrices, actuellement en exercice, devront
se pourvoir de nouvelles autorisations : MM. les maires, devront faire fermer
les écoles de celles qui n'en seront point munies à l'époque du 1er janvier
1820.
Aucune institutrice ne pourra , sous quelque prétexte
que ce soit , recevoir des garçons dans son école.
MM. les sous-préfets, ainsi que MM. les maires et
les comités cantonnaux sont invités à prendre les mesures nécessaires pour
que toutes les dispositions prescrites par la présente circulaire, qui sera insérée
au recueil administratif et adressée directement aux comités cantonnaux et aux
membres du jury d'examen , soient , sans délai , mises à exécution pour
qu'elles soient connues des personnes qu'elles peuvent concerner.
Recevez , Messieurs , l'assurance de ma considération
distinguée.
Pour M. le préfet absent par congé: Le conseiller
de préfecture, délégué,
Signé PINODIER.
Document mis à jour le 01-01-2004