(1er Bureau.) Circulaire à MM. les Sous-Préfets et Maires, concernant les formalités à remplir par ceux qui veulent obtenir des concessions de terrain en Algérie.
Nancy, le 21 novembre 1842.
MESSIEURS,
Quelques habitants du département s'étant adressés à M. le Ministre de la Guerre pour obtenir des concessions de terrains en Algérie, il m'a paru utile de porter à votre connaissance et à celle de vos administrés, des renseignements exacts sur la manière dont se font les concessions rurales en Algérie et sur les formalités dont elles nécessitent l'accomplissement.
La colonisation algérienne concentrée à présent, comme
point de départ, dans le sahel d'Alger, s'opère par l'établissement successif
de trois zones de villages que relient entre eux de bonnes routes, des chemins
vicinaux et d'exploitation.
Leurs emplacements sont choisis dans des localités d'une
salubrité reconnue, pourvues d'eau, à l'abri de toute attaque, à portée des
camps et des brigades de gendarmerie.
Chaque village, entouré d'une enceinte défensive, est
divisé en lots à bâtir disposés de manière à recevoir une maison, des écuries,
une cour et même un petit jardin. Un territoire de 4, 5 ou 600 hectares, selon
l'importance de l'établissement, est adjoint à chaque village et se trouve
divisé en lots à cultiver comprenant de 4 à 12 hectares, selon les
ressources, la famille et la position des concessionnaires. Ces ressources
doivent être de 1,000 â 1,500 fr., au moins, pour une petite famille.
La concession est gratuite, elle ne donnera lieu à une
redevance qu'après cinq ans. L'impôt foncier n'existe point encore en Algérie.
Chaque colon reçoit un titre provisoire de propriété,
aussitôt qu'il s'est établi au village; ce titre devient définitif, quand les
conditions de bâtir et de cultiver ont été remplies; la faculté d'hypothéquer
son fonds, même pendant que le titre n'est que provisoire, est accordée au
colon par le Directeur de l'Intérieur.
Des baraques sont établies dans les nouveaux villages pour
abriter les colons, en attendant qu'ils aient construit leurs maisons. A cet
effet, il leur est accordé, quand il est reconnu qu'ils ont des ressources pécuniaires
suffisantes, un secours en matériaux à bâtir, qui peut s'élever jusqu'à une
valeur de 600 fr.; ils sont en outre aidés dans la culture des terres par des
prêts temporaires de boeufs, et par des dons soit gratuits soit à charge de
remboursement, de semences et d'instruments aratoires. Des arbres fruitiers et
autres leur sont délivrés par la pépinière du Gouvernement.
Il importe que les colons ne se rendent dans la colonie
qu'après avoir fait parvenir leurs demandes à M. le Directeur de l'Intérieur
à Alger, soit directement, soit par l'intermédiaire de M. le Ministre de la
Guerre et après avoir reçu l'avis que des lots leur sont réservés dans un
village. Les colons qui auront reçu cet avis recevront aussi des permis de
passage gratuit de Marseille ou de Toulon à Alger et il importe surtout
qu'aucun ne fasse de disposition de départ, soit par la vente de ses propriétés,
soit de toute autre manière, avant d'avoir reçu l'avis ci-dessus indiqué.
Toutes les demandes de concessions doivent faire connaître
le nombre, l'âge et le sexe des membres de la famille ainsi que la somme dont
elle peut disposer, et sa déclaration, à cet égard, doit être certifiée par
le Maire et visée par le Sous-Préfet.
Veuillez, Messieurs, toutes les fois que l'occasion s'en présentera,
donner connaissance des renseignements qui précèdent à vos administrés.
Recevez, Messieurs, l'assurance de ma considération
distinguée.
Le Préfet de la Meurthe, L. ARNAULT.
Document mis à jour le 01-01-2004