(2ème Bureau.) Circulaire à MM. les Sous-Préfets, Maires et Commissaires de police du département , relative à des mesures sanitaires.Nancy, le 13 décembre 1845.
MESSIEURS,
Vous trouverez ci-après copie 1° d'une circulaire de M.
le Ministre de l'intérieur, en date du 5 décembre courant, qui prescrit de
nouvelles dispositions à prendre pour arrêter les progrès des maladies
syphilitiques et psoriques dans l'armée ; 2° Et d'une instruction émanée
du ministère de la guerre , sur le même objet.
Dans l'intérêt de l'état sanitaire de la population, je
ne puis trop vous recommander de pourvoir, en ce qui vous concerne, à la pleine
et entière exécution des mesures indiquées.
Recevez , Messieurs, l'assurance de ma considération
distinguée. Le Préfet de la Meurthe ,
L. ARNAULT.
Paris, 5 décembre 1845.
Monsieur le Préfet, je vous ai fait connaître, par mes
circulaires des 21 juin 1842 et 23 mai 1843, les dispositions qui avaient été
concertées entre le département de la guerre et le mien , pour combattre les
progrès des maladies syphilitiques et psoriques dans l'armée. J'ai fait un
appel à votre active vigilance, pour l'accomplissement des devoirs que vous
imposaient ces dispositions, qui ne pouvaient être complètement efficaces
qu'en se combinant avec les mesures que vous êtes chargé de prendre ou de
prescrire, à l'égard de la surveillance des filles publiques, des maisons de
prostitution et des maisons de logeurs.
Les résultats déjà obtenus sont très-satisfaisants. Je
me plais à reconnaître qu'ils sont dûs à l'empressement qu'ont mis les
administrations municipales et hospitalières, à seconder les efforts de
l'autorité militaire. Je dors également des éloges au corps médical, dont
le concours s'est fait généralement remarquer dans cette circonstance.
L'administration est trop accoutumée à recevoir de ce corps des preuves de zèle
et de désintéressement , pour que ces nobles sentiments lui fassent jamais défaut,
alors qu'elle les réclame dans l'intérêt de la société tout entière.
Cet accord parfait pour l'exécution des dispositions
prophylactiques, qui intéressent à la fois la population civile et l'armée ,
sur lesquelles les affections syphilitiques ou cutanées exercent une action réciproque
et si funeste, permet d'espérer, dans un temps peu éloigné, de notables améliorations
dans la santé publique. C'est donc une mesure d'hygiène qui doit appeler
naturellement le concours de tous ceux qui peuvent coopérer à sou succès.
Afin d'assurer l'entière exécution de l'arrêté du 10
mai 1842, M. le Ministre de la guerre, dans une nouvelle instruction dont je
joins ici un exemplaire, a jugé utile de compléter les mesures déjà concertées
avec mon département , par de nouvelles dispositions non moins importantes et
qui doivent atteindre, dans toutes leurs situations et faire traiter, au début
de leurs maladies, les militaires atteints d'affections syphilitiques ou
psoriques. Je ne puis donc que vous recommander de nouveau et avec les plus
vives instances, Monsieur le Préfet, un objet d'une aussi haute importance.
Veuillez user de tous les moyens qui sont en votre pouvoir pour amener les
administrations qui seraient encore en retard, à la stricte exécution de
mesures qui touchent de si près aux plus chers intérêts de la population.
Js vous prie de m'accuser réception de la présente
circulaire , et de lui donner, ainsi qu'à l'instruction de M. le ministre de la
guerre, la plus grande publicité possible, par la voie du Recueil des actes de
votre préfecture.
Recevez, Monsieur le Préfet , l'assurance de ma considération
la plus distinguée.
Le Ministre secrétaire d'État au département de l'Intérieur,
T. DUCHATEL.
Pour expédition, Le sous-secrétaire d'Etat,
A. PASSY.
A MM. les Lieutenants-généraux et Maréchaux de camp des
divisions militaires, Intendants et Sous-Intendants militaires, et les chefs de
corps et de légions de gendarmerie.
Paris, le 25 octobre 1845.
Messieurs, j'ai approuvé, le 10 mai 1842, diverses mesures
propres à combattre les progrès des maladies syphilitiques et psoriques dans
l'armée.
Ces mesures ne pouvaient être complètement efficaces
qu'en se combinant avec celles que les autorités municipales avaient à prendre
pour la surveillance des filles publiques, des maisons de prostitution et des
maisons de logeurs, qui servent trop snuvent à favoriser la débauche. M. le
Ministre de l'intérieur s'est empressé, par son arrêté du 21 juin 1842,
joint â ma note du 29 juillet suivant, de recommander â MM. les Préfets cet
objet d'une si haute importance pour l'hygiène publique. Afin d'assurer l'exécution
des dispositions concertées entre les deux ministères, j'ai décidé, le 29
mars 1843 (Journal militaire, page 120), que la gendarmerie concourrait à
l'accomplissement des formalités prescrites par les articles 7, 8, 9 et 10 de
mon arrêté du 10 mai.
J'ai également approuvé, le 22 juin 1843 (Journal
militaire, p. 524), que l'indemnité de route fût payée aux militaires en congé
provisoire de libération ou appartenant à la réserve qui sont dirigés sur
les hôpitaux militaires ou civils, comme atteints de maladies cutanées ou vénériennes.
De son côté, par une circulaire du 15 mars 1845, M. le
Ministre de l'intérieur a signalé aux autorités civiles la nécessité d'établir
des casernes de passage pour le logement des militaires voyageant en corps ou
isolément, et de soumettre à une surveillance active et permanente les maisons
de logement destinées aux militaires, à défaut de caserne de passage; la
gendarmerie, d'après mon ordre du 17 avril dernier, doit faire des visites fréquentes
dans ces maisons, et plus particulièrement lorsque des corps de troupes et des
détachements sont annoncés, afin de s'assurer si l'ordre et la propreté y règnent,
et si les militaires ne sont envoyés que dans des logements dont la convenance
aurait été reconnue par l'autorité municipale.
Enfin, j'ai appelé la sollicitude de MM. les lieutenants-généraux
commandant les divisions militaires sur cet important service, et je les ai
invités , le 31 août , à user de leur haute influence pour déterminer les
administrations municipales des villes principales à établir des casernes de
passage.
La stricte exécution des mesures que je viens de rappeler
promet, dans un avenir peu éloigné, de grandes améliorations pour la santé
publique.
Les résultats obtenus ont déjà dépassé mes espérances
; ils attestent le dévouement des officiers de santé militaires et la
philanthropie des commissions administratives des hôpitaux et hospices civils ,
qui sont venus puissamment en aide aux efforts des départements de l'intérieur
et de la guerre, en ouvrant pour les deux sexes des salles spéciales où ces
affections contagieuses peuvent être traitées au moment même où les premiers
symptômes viennent à se déclarer.
Une dernière disposition m'a paru devoir être prescrite
pour que je puisse avoir la certitude que les militaires voyageant isolément
sont exactement visités au moment de leur départ et pendant leur marche,
lorsqu'il y a lieu.
Vous ne perdrez pas de vue qu'aux termes des articles 8 et
9 de l'arrêté du 10 mai 1842, tout brigadier, caporal ou soldat voyageant isolément
est soumis à une visite sanitaire. L'officier de santé constatera cette
visite par un certificat joint à la feuille de route du militaire.
Les sous-intendants militaires annoteront à l'encre rouge,
en marge de la feuille de route, que le certificat de visite y est annexé. Ceux
de ces fonctionnaires placés sur la ligne d'étapes que l'homme aura à
parcourir signaleront, en marge de leur registre de route , les militaires
voyageant isolément pour qui les formalités ci-dessus n'auraient pas été
remplies.
A l'expiration de chaque trimestre , les sous-intendants
militaires adresseront à l'intendant divisionnaire un état nominatif conforme
au spécimen ci-après, faisant connaître ceux des militaires de passage dans
leur arrondissement qui n'auraient pas été visités avant leur départ et le résultat
de la visite qu'ils leur auront fait subir. A la suite de cet état, les
sous-intendants militaires feront connaître les mesures adoptées pour le
traitement des maladies syphilitiques et psoriques dans les hôpitaux civils de
leur arrondissement, pour les visites sanitaires, la surveillance des prostituées
et celle des maisons de logeurs, ainsi que pour la création des casernes de
passage.
Ces états seront résumés par MM. les intendants
divisionnaires dans un tableau également conforme au modèle déjà indiqué,
qu'ils me transmettront avant l'expiration du premier mois qui suivra chaque
Trimestre.
J'attache une grande importance à ce que les diverses
mesures que je viens de rappeler soient ponctuellement exécutées, et je suis
assuré, Messieurs, que chacun de vous concourra avec un zèle constant , dans
le cercle de ses attributions , aux résultats que je veux obtenir pour le bien-être
de l'armée, non moins que dans l'intérêt de la santé publique.
Le Président du Conseil, Ministre Secrétaire d'Etat de la
guerre,
Signé Mal. duc DE DALMATIE. Pour ampliation
Le Conseiller d'Etat, Secrétaire général,
Baron MARTINEAU DES CHESNEZ.
Document mis à jour le 01-01-2004