CABINET DU PRÉFET. - Jeu de hasard. - Le « National ».Nancy, le 30 novembre 1907.
Le préfet de Meurthe-et-Moselle à MM. les maires, commissaires spéciaux et commissaires de police de Meurthe-et-Moselle.
Je suis informé que, s'appuyant sur diverses décisions judiciaires, et notamment sur un arrêt de la cour d'appel d'Aix en date du 25 mai 1892 et un arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 8 juillet 1904, qui ont considéré le jeu de billard, Le National, comme étant un jeu d'adresse, un certain nombre de maires en tolèrent le fonctionnement dans les établissements publics de leur commune.
Cette jurisprudence ne peut se justifier que lorsque le National est pratiqué entre joueurs qui se connaissent et peuvent apprécier leur force respective ; quand ces conditions sont remplies, il s'agit évidemment d'un jeu d'adresse.
Mais il en est tout autrement lorsque, comme cela se produit presque toujours, les parties donnent lieu à des paris entre personnes ne se connaissant pas entre elles et ne se rendant pas compte de l'adresse ou de l'habileté des joueurs, dans ce cas, les parieurs obéissent exclusivement à la passion du jeu et ne recherchent que l'occasion de chances aléatoires pour réaliser un gain. Le National doit être alors considéré comme un véritable jeu de hasard tombant sous l'application de l'article 410 du Code pénal. C'est ce qui résulte nettement d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 16 mars 1905.
Je vous prie de vouloir bien en aviser les tenanciers d'établissements où le National serait joué dans les conditions susindiquées et de les inviter à en cesser immédiatement l'exploitation. S'ils n'obéissaient pas à cette mise en demeure, procès-verbal devra être dressé contre eux et transmis au parquet.
Le préfet, HUMBERT.
Document mis à jour le 04-03-2004